Les zones humides assurent des fonctions essentielles pour soutenir le débit d’étiage des cours d’eau, ralentir les ruissellements, stocker le carbone, accueillir la faune et la flore… mais les atteintes sur celles-ci se poursuivent. Quand un projet d’aménagement impacte les fonctions d’une zone humide, des mesures d’évitement, de réduction et de compensation (séquence ERC) peuvent être requises sur les fonctions du site impacté et du site de compensation.
Pour garantir des gains fonctionnels sur un site de compensation au moins équivalents aux pertes, une mesure de compensation écologique doit donc y être dimensionnée durant l’élaboration d’un projet d’aménagement. Cela revient donc à analyser :
- le risque d’échec associé à la mesure de compensation proposée ;
- le délai pour obtenir les résultats escomptés ;
- les enjeux inhérents au territoire où est envisagé le projet d’aménagement.
Le résultat de cette analyse est se matérialise sous la forme d’un ratio fonctionnel attribué au projet d’aménagement.
/!\ Ce ratio fonctionnel diffère du ratio surfacique préconisé par ex. par un SDAGE et/ou un SAGE. Les deux ratios ne se substituent pas l’un à l’autre.
Cet exercice de dimensionnement est souvent flou, ambigu, voire pas réalisé du tout, alors qu’il est requis par la règlementation en vigueur.
Une interface de dimensionnement a donc été conçue pour permettre aux parties prenantes (acteurs du territoire et porteur de projet) de dimensionner une mesure de compensation écologique sur les fonctions des zones humides, et promouvoir la non-perte nette de fonctions des zones humides !!!
Elle intègre des connaissances :
- en sciences humaines et sociales. L’ingénierie territoriale peut alors accompagner la mise en œuvre de la règlementation selon les caractéristiques propres à son territoire. Des éléments règlementaires, scientifiques, sociaux, économiques, territoriaux et politiques sont pris en compte pour définir un intervalle de variation entre lequel peut varier le ratio fonctionnel sur un territoire (voir Figure 1)
- en écologie. Des critères sur le site de compensation portant sur les trajectoires écologiques (habitat initial et habitat attendu avec l’action écologique envisagée), le génie écologique (dépoldérisation, déblaiement, fauche…)… sont exploités pour évaluer la faisabilité et le délai avant d’obtenir les résultats de la compensation écologique (Figure ci-après). Elle souligne des risques d’échecs ou des délais potentiellement importants associés à une mesure de compensation écologique, sans pénaliser des mesures de compensation écologiques ambitieuses.
Sur un exemple fictif, un intervalle de variation de [1-5] préconisé sur un territoire reviendrait à ce que le ratio fonctionnel soit de 1 pour 1 dans le cas où la mesure de compensation écologique aboutirait vraisemblablement aux résultats les plus rapides et les plus certains. En revanche, il pourrait atteindre au maximum 5 pour 1 dans le cas inverse. Les parties prenantes peuvent ainsi déterminer les niveaux d’effort attendu de la part des maîtres d’ouvrage pour tendre vers la non-perte nette de fonctions.
Cette interface de dimensionnement a été élaborée durant une démarche de Recherche et Développement qui a associé des collectivités locales, des établissements publics de l’État, des services de l’État, des professionnels du génie écologique… Des tests ont été réalisés en particulier avec le Syndicat Mixte pour le Développement Durable de l’Estuaire de la Gironde et le Syndicat Mixte des Étangs Littoraux.
Insérée dans la version 2 de la méthode nationale d’évaluation des fonctions des zones humides, l’interface de dimensionnement est opérationnelle. Elle permet aux acteurs des territoires d’améliorer les pratiques pour concevoir, rédiger, instruire… les dossiers d’autorisation environnementale sur le volet « fonctions » des zones humides.
Dans le tableur associé à la méthode, elle fait l’objet d’un onglet dédié. Après le renseignement des caractéristiques écologiques d’une mesure de compensation écologique et d’un intervalle de variation du ratio fonctionnel par ses parties prenantes, un ratio fonctionnel automatisé est proposé par l’interface (Figure 2.). Les parties prenantes peuvent alors valider ce ratio fonctionnel automatisé, ou réaliser elles-mêmes le dimensionnement en tenant compte des caractéristiques singulières du projet d’aménagement envisagé – sous réserves de l’argumenter – pour aboutir à un ratio fonctionnel actualisé.